[
quote]Suède: Les ministres au régime sec
AUJOURD'HUI, c'est raggmunk, des sortes de crêpes de pommes de terre au lard, ou bien pâtes au saumon. Pas d'alcool, pas de fromage, ni de dessert, mais... du lait froid. Le tout pour 64 couronnes suédoises (environ 6 €). Un peu plus cher qu'au McDonald's, mais avec une rose blanche sur les tables et la vue sur le Parlement.
À deux pas des ministères, près de la résidence du premier ministre, se trouve la cantine du gouvernement. Le plateau à la main, on y croise des secrétaires, des hauts fonctionnaires et les ministres. En Suède, «les ministres mènent une vie normale, souligne Lena Hjelm-Wallén, ancien ministre (social-démocrate) des Affaires étrangères. Il ne s'agit pas de gaspiller l'argent des contribuables ! Bien sûr, au ministère des Affaires étrangères, il y a un cuisinier et des salons pour recevoir nos hôtes. Mais au quotidien, pourquoi ne pas déjeuner à la cantine ?»
Modestie, rigueur et honnêteté : voilà les premières qualités exigées des ministres suédois. «Ici, pour être élu, il faut être de milieu simple, et savoir le rester, affirme Lena Hjelm-Wallén. Regardez au Parlement : il y a très peu d'avocats, d'hommes ou de femmes d'affaires !» Mariée à un soudeur, elle n'a jamais imaginé, du temps où elle était ministre, changer de mode de vie. «Nous habitions toujours la petite maison construite par mon mari, à 120 km de la capitale. Pour plus de commodité, j'ai juste loué un studio de 27 m2 à Stockholm.»
Transparence
Aucun logement de fonction n'est proposé aux ministres suédois. Seul le premier d'entre eux a droit à un appartement – 175 m2, pour lesquels il paie un modeste loyer – dans une belle maison blanche sur les quais. Pas de voitures avec chauffeur non plus, mais une flotte de 16 véhicules, pour 22 membres du gouvernement. Quant aux bureaux, ils sont fonctionnels, avec des meubles de type Ikea, «que l'on ne remplace que lorsqu'ils sont usés», précise un fonctionnaire.
Directeur de la politique du personnel au ministère des Finances, Göran Rodin consulte ses fiches : «Le premier ministre a un salaire mensuel de 121 000 couronnes (13 000 €). Les autres membres du gouvernement ont tous la même rémunération : 97 000 couronnes. Dont environ la moitié part en impôts.»
Frais de réception, de déplacement, communications téléphoniques : tout est minutieusement réglementé et vérifié. «Aucun excès n'est autorisé», précise la circulaire du ministère des Finances. Leurs coups de fil privés, les ministres les donnent avec leur portable personnel. Ils voyagent en classe économique, sauf sur les vols long-courriers. Le seul poste en augmentation est celui de la sécurité, depuis l'assassinat, il y a trois ans, du ministre des Affaires étrangères, Anna Lindh. Les membres du gouvernement ont dorénavant droit à un garde du corps lors de certains déplacements.
Transparence oblige, les notes de frais et courriers des ministres sont consultables par chaque concitoyen ! Reporter au quotidien Expressen, Tommy Schönstedt épluche «presque chaque semaine» les comptes des différents ministères. En ce moment, c'est la nouvelle maison du premier ministre qui fait la une de son journal : Göran Persson vient de se faire construire une magnifique résidence à la campagne, pour un total de 17 millions de couronnes (1,8 million d'euros). «Aucune tricherie là-dedans, commente Tommy Schönstedt. Mais pour un social-démocrate, c'est très mal vu. Il en faut peu pour choquer nos lecteurs : un seul verre de whisky pourrait faire un scandale.» Et si d'aventure, renchérit un fonctionnaire, «un ministre oubliait de débarrasser son plateau à la cantine, vous n'imaginez pas les titres dans la presse !»
Fin 1995, pour quelques barres chocolatées et des couches-culottes réglées avec sa carte de crédit de fonction, Nona Sahlin, le numéro deux du gouvernement d'Ingvar Carlsson, avait dû démissionner. Aujourd'hui ministre du Développement durable, elle trouve «tout à fait normal» que les journalistes puissent farfouiller dans ses justificatifs. «Je n'aimerais pas du tout vivre comme mes collègues français, confie-t-elle. Je tiens à m'occuper moi-même de ma maison et de mes trois enfants. Et pourquoi voulez-vous que j'emploie une femme de ménage : j'ai un mari !»
source: le figaro - 2006[/quote]
AUJOURD'HUI, c'est raggmunk, des sortes de crêpes de pommes de terre au lard, ou bien pâtes au saumon. Pas d'alcool, pas de fromage, ni de dessert, mais... du lait froid. Le tout pour 64 couronnes suédoises (environ 6 €). Un peu plus cher qu'au McDonald's, mais avec une rose blanche sur les tables et la vue sur le Parlement.
À deux pas des ministères, près de la résidence du premier ministre, se trouve la cantine du gouvernement. Le plateau à la main, on y croise des secrétaires, des hauts fonctionnaires et les ministres. En Suède, «les ministres mènent une vie normale, souligne Lena Hjelm-Wallén, ancien ministre (social-démocrate) des Affaires étrangères. Il ne s'agit pas de gaspiller l'argent des contribuables ! Bien sûr, au ministère des Affaires étrangères, il y a un cuisinier et des salons pour recevoir nos hôtes. Mais au quotidien, pourquoi ne pas déjeuner à la cantine ?»
Modestie, rigueur et honnêteté : voilà les premières qualités exigées des ministres suédois. «Ici, pour être élu, il faut être de milieu simple, et savoir le rester, affirme Lena Hjelm-Wallén. Regardez au Parlement : il y a très peu d'avocats, d'hommes ou de femmes d'affaires !» Mariée à un soudeur, elle n'a jamais imaginé, du temps où elle était ministre, changer de mode de vie. «Nous habitions toujours la petite maison construite par mon mari, à 120 km de la capitale. Pour plus de commodité, j'ai juste loué un studio de 27 m2 à Stockholm.»
Transparence
Aucun logement de fonction n'est proposé aux ministres suédois. Seul le premier d'entre eux a droit à un appartement – 175 m2, pour lesquels il paie un modeste loyer – dans une belle maison blanche sur les quais. Pas de voitures avec chauffeur non plus, mais une flotte de 16 véhicules, pour 22 membres du gouvernement. Quant aux bureaux, ils sont fonctionnels, avec des meubles de type Ikea, «que l'on ne remplace que lorsqu'ils sont usés», précise un fonctionnaire.
Directeur de la politique du personnel au ministère des Finances, Göran Rodin consulte ses fiches : «Le premier ministre a un salaire mensuel de 121 000 couronnes (13 000 €). Les autres membres du gouvernement ont tous la même rémunération : 97 000 couronnes. Dont environ la moitié part en impôts.»
Frais de réception, de déplacement, communications téléphoniques : tout est minutieusement réglementé et vérifié. «Aucun excès n'est autorisé», précise la circulaire du ministère des Finances. Leurs coups de fil privés, les ministres les donnent avec leur portable personnel. Ils voyagent en classe économique, sauf sur les vols long-courriers. Le seul poste en augmentation est celui de la sécurité, depuis l'assassinat, il y a trois ans, du ministre des Affaires étrangères, Anna Lindh. Les membres du gouvernement ont dorénavant droit à un garde du corps lors de certains déplacements.
Transparence oblige, les notes de frais et courriers des ministres sont consultables par chaque concitoyen ! Reporter au quotidien Expressen, Tommy Schönstedt épluche «presque chaque semaine» les comptes des différents ministères. En ce moment, c'est la nouvelle maison du premier ministre qui fait la une de son journal : Göran Persson vient de se faire construire une magnifique résidence à la campagne, pour un total de 17 millions de couronnes (1,8 million d'euros). «Aucune tricherie là-dedans, commente Tommy Schönstedt. Mais pour un social-démocrate, c'est très mal vu. Il en faut peu pour choquer nos lecteurs : un seul verre de whisky pourrait faire un scandale.» Et si d'aventure, renchérit un fonctionnaire, «un ministre oubliait de débarrasser son plateau à la cantine, vous n'imaginez pas les titres dans la presse !»
Fin 1995, pour quelques barres chocolatées et des couches-culottes réglées avec sa carte de crédit de fonction, Nona Sahlin, le numéro deux du gouvernement d'Ingvar Carlsson, avait dû démissionner. Aujourd'hui ministre du Développement durable, elle trouve «tout à fait normal» que les journalistes puissent farfouiller dans ses justificatifs. «Je n'aimerais pas du tout vivre comme mes collègues français, confie-t-elle. Je tiens à m'occuper moi-même de ma maison et de mes trois enfants. Et pourquoi voulez-vous que j'emploie une femme de ménage : j'ai un mari !»
source: le figaro - 2006[/quote]
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